« La démarche palliative est un projet de société qui devrait être l’affaire de tous »

Après la dernière soirée santé « Cancer : Quels sont nos risques ? » Lille Grand Palais organise « Soins palliatifs : vivre la maladie autrement » le 11 février prochain.
À cette occasion, nous avons posé trois questions au Docteur Henri Delbecque, Président d’honneur et Fondateur de la Coordination Régionale de Soins Palliatifs du Nord-Pas de Calais, qui interviendra lors de la conférence.

Quel est votre parcours ?

J’ai été chef de service de Médecine Interne au Centre hospitalier de Dunkerque. Durant ces années, j’ai été confronté comme d’autres aux situations complexes de personnes atteintes de maladies incurables à une époque où les compétences en soins palliatifs n’étaient pas connues en France. Mais grâce à une publication, j’ai découvert les antalgiques morphiniques mis au point par le Dr Cicely Saunders, qui a aussi « inventé » les soins palliatifs en 1967.
Vers 1976, j’ai commencé à utiliser le sirop de morphine à doses horaires pour soulager les douleurs parfois intolérables, c’était une première !
J’ai vécu une étape importante de ma vie de soignant en étant appelé au Cabinet du Ministre de la Santé Claude Evin comme conseiller technique entre 1988 et 1990. Celui-ci m’a confié la mission de faire l’état des lieux des progrès concernant les soins palliatifs en France. Il faut savoir qu’en 1990 ils étaient encore très peu connus et enseignés, malgré la circulaire de 1986, le premier texte officiel encourageant leur développement .
Le rapport « Delbecque » publié par le Ministre Kouchner en 1993 a contribué à faire connaître les soins palliatifs (seulement 1 français sur 10 en avait entendu parler en 1991) car il n’y avait, en France, aucune formation des généralistes concernant les soins palliatifs ou la lutte contre la douleur. La loi du 9 Juin 1999 voulue et préparée au Sénat par le regretté Lucien Neuwirth et par le Ministre Bernard Kouchner, qui « vise à garantir l’accès aux soins palliatifs et à l’accompagnement de toute personne dont l’état le requiert », s’est appuyée sur ce rapport.
Je continue à promouvoir les soins palliatifs et l’accompagnement même si je suis actuellement à la retraite. Je suis le Président fondateur de l’association « Aujourd’hui la vie » ainsi que du réseau de supports soins palliatifs « Amavi ». Je suis également chargé d’enseignement dans diverses universités de la région.
Mon travail au quotidien est donc de participer comme bénévole à la construction d’une société plus solidaire à l’égard de l’individu et de la population souffrant de maladie, en collaborant à une meilleure organisation médico-sociale.  Les enjeux sont considérables et méritent d’être relevés.

Selon vous qu’est-ce que les soins palliatifs?

Les soins palliatifs, c’est aider la personne malade à garder ses repères, ses habitudes, son confort et ses projets. C’est organiser le quotidien du malade en tentant de répondre à l’ensemble de ses besoins, de ses attentes et de ses désirs ainsi que ceux de son entourage familial.
C’est aussi « Faire de son mieux », chacun doit pouvoir rester maître de ses choix et acteur de sa vie, même finissante. Le malade doit être au centre des préoccupations ni rejeté, ni exclus, ni manipulé, ni violenté, ni abandonné mais encouragé à vivre selon ses propres ressources et choix. Il doit donc être informé tôt par une annonce « loyale et claire mais avec prudence » (Code de déontologie Médicale). Sa vie doit être respectée, et non prolongée par une obstination déraisonnable, ni accélérée par euthanasie, selon le Droit des malades en particulier défini par la loi Leonetti du 22 avril 2005 et inclu dans la charte et les définitions de la SFAP et de l’Organisation Mondiale de la Santé. La démarche palliative est toute à la fois médicale, psychologique et sociale. La souffrance et la mort de notre condition humaine interrogent chacun sur les réponses possibles et leurs limites sur le sens du soin, celui de la vie, les valeurs, le droit et la politique. C’est un projet de société qui devrait être l’affaire de tous et enseigné tôt dans la vie pour moins d’incompréhension sur le sens des mots et moins d’indifférence ou de ségrégation à l’égard des personnes fragiles ou devenues vulnérables.
Les soins palliatifs conduisent à changer de regard sur la personne gravement malade.

Comment s’opère l’accompagnement et l’aide aux malades ?

Pour les professionnels, il s’agit d’accompagner le malade avec empathie et disponibilité. Les aidants familiaux, trop souvent seuls et en demande d’informations, ont aussi besoin d’être accompagnés. La dimension technique et la dimension relationnelle du soin ne doivent pas être dissociées entre le soignant et le soigné. Le mouvement des soins palliatifs et de l’accompagnement des malades en fin de vie est une nouvelle forme de bénévolat organisé en association pour donner du temps gratuitement à la personne isolée et gravement malade. Les membres de ces associations sont sélectionnés, formés et suivis en supervision.

Soirée Santé : Soins palliatifs vivre la maladie autrement – mardi 11 février 2014 – 18h30 – 22h30 – Entrée gratuite – Inscription conseillée : www.soiree-sante.com

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